La Bataille d’Alger
Samedi 10 novembre à 14h. Cinéma Victor Hugo. • Réalisé par Gilles Pontecorvo • Algérie/Italie, 1971, 90 min • Avec Brahim Haggiag, Jean Martin, Yâcef Saadi, Halima, Ugo Paletti.
Octobre 1957, les parachutistes de l’armée française envahissent la Casbah d’Alger afin d’en déloger Ali La Pointe, l’un des dirigeants algérois du FLN. Alors que les soldats français progressent dans les rues de la Casbah confrontés à une guérilla urbaine bien entraînée, le leader indépendantiste se remémore son passé d’ancien délinquant devenu militant armé…
Présentation
Avant de réaliser La Bataille d’Alger en 1966, le cinéaste Gilles Pontecorvo avait déjà attiré l’attention sur lui avec deux films ambitieux : Un dénommé Squarcio, avec Yves Montand, et Kapo. Tous deux sont marqués par la volonté de faire des films populaires et didactiques, une orientation que confirma son quatrième film Queimada, avec Marlon Brando. Coécrit avec Franco Solinas, La Bataille d’Alger s’articule autour d’un épisode précis : le moment où, le 7 octobre 1957, les parachutistes français envahissent la Casbah d’Alger pour capturer Ali la Pointe, le responsable de la guerilla, dans la ville alors en état de siège. Pour Pontecorvo et Solinas le projet du film, qui s’intitulait alors Paras, datait de bien avant la fin de la guerre d’Algérie. Les deux hommes avaient même mené une enquête journalistique dans la Casbah, réputée alors comme dangereuse selon les journalistes européens. Mais pour mener à bien leur projet, ils durent attendre l’indépendance de l’Algérie. Les nouvelles autorités algériennes aidèrent alors le film en le subventionnant, allant même jusqu’à le superviser et contrôler son exécution.
De nationalité italo-algérienne, La Bataille d’Alger eut comme coproducteur, aux côtés des investisseurs italiens, la société Casbah Films dirigée alors par Yacef Saadi, soit l’ancien chef politique du FLN pour la ville d’Alger et dont les souvenirs avaient servi de base au scénario du film. Yacef joue d’ailleurs dans le film son propre rôle de dirigeant politique de premier plan. La Bataille d’Alger obtint, en 1966, le Lion d’Or au Festival de Venise. Mais ce n’est que quatre ans plus tard qu’il fut présenté à la Commission de censure française, laquelle lui accorda son visa d’exploitation. Sorti sur les écrans parisiens en octobre 1971, le film disparut toutefois très rapidement de l’affiche, pour des raisons strictement politiques. Certains en France lui reprochant son caractère partisan, son soutien à la cause algérienne et à la politique du FLN. Bien des années plus tard, en août 2003, le film fut projeté au Pentagone, en présence des officiers d’État-Major et de civils de l’administration Bush. Il s’agissait pour les autorités militaires américaines, alors confrontées à la guerre en Irak, d’évaluer la façon dont l’armée française s’était comportée dans des circonstances assez analogues. Autrement dit, comment être une armée d’occupation capable de se protéger contre l’éventuelle hostilité de la population locale. Tant et si bien que six mois plus tard, le film de Gilles Pontecorvo ressort sur les écrans américains, après avoir fait l’objet d’une avant-première publique en présence de Yacef Saadi. Il connaît alors un véritable succès public, près de quarante ans après sa sortie et des faits qu’il retrace.
Gillo Pontecorvo
Gillo Pontecorvo (1919 - 2006) est un cinéaste et réalisateur italien. D'origine juive italienne, chimiste de formation, il se tourne rapidement vers le journalisme et devient correspondant à Paris de plusieurs publications italiennes. En 1941, il rejoint le Parti communiste italien et participe à des activités anti-fascistes dans le nord de l'Italie. Après la répression soviétique de l'insurrection de Budapest en 1956, il rompt avec le PCI, tout en continuant à se réclamer du marxisme.
Il débute au cinéma après la Seconde Guerre mondiale comme assistant d'Yves Allégret et Mario Monicelli notamment. À partir de 1953, il réalise ses premiers essais documentaires (Giovanna, MM, 1956).
En 1956, il contribue à un épisode de La Rose des Vents (Die Windrose), supervisé par Alberto Cavalcanti. L'année suivante, il dirige son premier long-métrage, Un dénommé Squarcio (La grande strada azzurra, co-réalisé avec Maleno Malenatti, d'après un roman de Franco Salinas).
Puis il décrit l'univers concentrationnaire et s'impose, en 1960, avec Kapò, histoire d'une juive qui devient l'auxiliaire des nazis.
En 1966, il met en scène son film le plus important, La Bataille d'Alger (La Battaglia di Algeri), remarquable reconstitution d'un épisode fondamental de la guerre d'Algérie, qu'il sait recréer avec réalisme et objectivité l'action policière de l'armée française pendant la bataille d'Alger. Ce film est récompensé par le Lion d'Or du Festival de Venise, mais il demeure longtemps interdit en France et son exploitation provoque de nombreux remous.
En 1992, il a été nommé directeur du Festival de Venise.
Gillo Pontecorvo a été membre d'honneur du Club de Budapest.