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Documentaires en compétition

Le festival continue à proposer une compétition dédiée exclusivement aux films documentaires. Les quatre programmateurs ont visionné plus de 60 projets pour n’en retenir que 12 qui seront soumis à l’appréciation du jury présidé cette année encore par Anne Lainée. La compétition restreinte permet de présenter un panorama de l’Afrique actuelle avec un réel courage. Les programmateurs proposent des films documentaires en hors-compétition et innovent avec une nouvelle section axée sur des films ethnographiques. Beaucoup de films seront accompagnés par leurs réalisateurs, entre autre Simplice Ganou, lauréat 2011, qui viendra à Besançon dans le cadre du mois du documentaire rechercher son prix…

Bouts de vies, Bouts de rêves

Lundi 11 novembre à 14 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Hamid Benamra • Algérie, 2012, 104 min.

Bouts de vies, Bouts de rêves

Le réalisateur lui-même présente ainsi son film : « Être révolutionnaire ce n’est pas toujours porter une kalachnikov mais être témoin de son histoire. »

À partir de bouts de papiers collés les uns aux autres s’alignent et se dessinent les caractères de personnalités aux mille facettes. À partir de revues de luxe affichant l’opulence d’un monde inaccessible, on met à nu des figures ayant forcé les portes de l’histoire. À partir de produits véhiculant un rêve de consommation outrancier, on met en lumière les rêves et l’idéal de tout un peuple.

Ce n’est pas un sujet sur la lutte des classes, mais une mise en évidence d’un paradoxe entre un Sud en quête de nourriture et un Nord avide d’expansion. Ce n’est pas un sujet sur une curiosité technique d’un artiste original mais une mise en relief d’un propos et d’une préoccupation d’un citoyen conscient de son histoire. Ce n’est pas un sujet de détournement d’un discours mais un rappel des histoires occultées de nos mémoires. Ce n’est pas un sujet sur un artiste revendicatif mais le bout à bout de revendications d’hommes et de femmes ayant choisi d’aller au bout de leur rêve.

« Objet filmique non-identifié […] Un collage violent […]. Décortiquant le langage, malmenant le fil narratif, il distord le récit de son film [...] dans une construction qui prend finalement une tournure dynamique et totalement compréhensive. » Commentaire du journaliste Samir Ardjoum - El Watan Project, 10 nov. 2012

Hamid Benamra

Avec deux passeports et deux langues, il a vécu en Algérie jusqu’à ses 23 ans. Il réside depuis en France. À 5 ans, il découvre, fasciné, le cinéma et à 20 ans il a déjà réalisé 4 fictions, dont certaines seront primées à Alger, Bruxelles et au Fespaco. Après des études de philosophie à Alger, une bourse du gouvernement français le conduit à Paris enrichir sa formation cinématographique à l’ESEC et l’École des Hautes Études. En 1982, Mouny Berrah le comparera à Godard et dira de lui : « Avec des moyens dérisoires, avec un sens du cinéma étonnant, Abdelhamid Benamra interroge cet adjectif étroit dans lequel est enfermé un certain cinéma, du vrai cinéma, du cinéma tout court. » Depuis, sa caméra ne l’a jamais quitté et filme des rencontres, des êtres dont l’art, l’humanité et l’engagement le touchent. 30 ans plus tard, 2012 marque un tournant avec l’achèvement de Bouts de vies, bouts de rêves, un hommage aux vrais révolutionnaires, Miriam Makeba, Angela Davis, Henri Alleg, Abraham Serfati et tant d’autres…

Bruxelles-Kigali

Dimanche 10 novembre à 16 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Marie-France Collard • Rwanda, 2012, 113 min.

Bruxelles - Kigali

En novembre 2009, la Cour d’Assises de Bruxelles jugeait Ephrem Nkezabera, banquier et dirigeant des milices extrémistes, fer de lance du génocide des Tutsi et du massacre des opposants politiques Hutu au Rwanda en 1994…

Un film fort sur le procès d’un génocidaire rwandais, avec des témoignages de rescapés vivant en Belgique. D’avril à juillet 1994, le génocide des Tutsis et le massacre des opposants hutus a fait entre 800 000 et un million de morts.

Aujourd’hui, des centaines de personnes suspectées de crime de génocide vivent en liberté dans de nombreux pays. La plupart ne seront sans doute jamais ni arrêtées, ni jugées. Car ce ne sont pas uniquement les victimes, mais aussi les bourreaux qui ont fui en masse, fin juin 1994, et qui ont obtenu l’asile. En Belgique, la détermination des victimes et de leurs avocats a finalement abouti à la tenue de trois procès. Ce qui représentait pour les victimes et leurs proches la perspective d’une possible reconstruction. Bruxelles-Kigali est le film d’un de ces procès, celui d’Ephrem Nkezabera, un dirigeant des milices extrémistes hutu – les Interahamwé, principaux responsables du génocide. Le procès s’est tenu en novembre 2009, durant un mois, malgré l’absence de l’accusé pour raisons médicales. Mais il avouera ses actes, contestant uniquement le viol des femmes. Le fil narratif du film suit l’action judiciaire, et rend compte des principales étapes de ce procès. Les débats ont pu exceptionnellement être filmés. À la lumière de ceux-ci, des rescapés et proches de victimes s’expriment sur leur ressenti 15 ans après le génocide, avec ces questions : au-delà de la souffrance qui ne s’éteindra jamais, le deuil est-il possible ? Et où en sont la réparation et la justice alors que le TPIR (Tribunal Pénal International pour le Rwanda) aura bientôt clôturé ses travaux et que victimes et bourreaux se croisent régulièrement, en Belgique et dans d’autres pays européens ? Ce film est donc aussi un documentaire d’investigation sur la cohabitation en Belgique, en France et au Rwanda, entre anciens génocidaires et rescapés rwandais. Quels sont les mécanismes et les réseaux qui permettent à certains coupables avérés (une liste a été publiée par Interpol) de vivre chez nous en toute impunité ? Quels sont les parcours de ces rescapés pour obtenir justice et faire aboutir leurs plaintes ? En dehors du Rwanda, six pays ont, à ce jour, jugé des personnes impliquées dans le génocide des Tutsis : la Suisse, la Belgique, les Pays-Bas, le Canada, la Finlande et l’Allemagne. Le TPIR clôture ses travaux fin 2014. Un peu plus de 70 affaires y auront été traitées sans aucune réparation pour les victimes.

Marie-France Collard

Marie-France Collard est documentariste, performer, femme de théâtre. Depuis 1990, elle est membre du Groupov, collectif belge d’artistes de différentes disciplines (théâtre, vidéo, écriture, musique, etc.) et différentes nationalités, qui pendant un temps a orienté ses recherches sur « la question de la vérité » et a entrepris le projet Rwanda 94 dont Marie-France Collard est co-auteur. Depuis plus de 20 ans, cette artiste protéiforme tisse une œuvre qui touche à tous les thèmes fondamentaux de notre temps.

En Éthiopie sur les traces des premiers chrétiens

Samedi 9 novembre à 16 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Jean-Louis Saporito • Éthiopie, 2011, 52 min.

En Éthiopie sur les traces des premiers chrétiens

Dans la province du Tigré, au Nord de l’Éthiopie, il existe un territoire fermé et reculé, le Woldeba, entièrement dédié à la vie monastique. Là-bas vivent environ un millier de moi- nes et d’ermites qui mènent, à l’abri des regards et loin du monde profane, une vie d’abstinence, de jeûne et de prière perpétuelle. Leurs monastères, juchés sur de hauts plateaux désertiques, suscitent à la fois l’étonnement et la fascination. On y accède très difficilement, il faut plusieurs heures de marche et l’autorisation des autorités religieuses pour y pénétrer. Le Woldeba est un territoire secret, aux paysages magnifiques, quasiment inconnu des non éthiopiens. Ce sera la première fois qu’un film sera réalisé sur les moines de cette région. L’Éthiopie est le seul pays d’Afrique noire qui n’a pas été évangélisé par des missionnaires occidentaux : elle est devenue chrétienne au milieu du IVè siècle, après l’Arménie en 301 et avant l’Empire romain en 391. Depuis cette époque, l’Église éthiopienne orthodoxe s’est développée d’une façon singulière et originale à travers ses propres saints et légendes locales, tout en puisant sa source aux enseignements des premiers moines chrétiens d’Égypte, Saint Antoine et Saint Pacôme. Aujourd’hui au Tigré, 95 % de la population est chrétienne, ainsi que près de la moitié des 80 millions d’éthiopiens. Ils considèrent que leur Église, l’Église orthodoxe éthiopienne, est la plus proche du christianisme des origines. Le fil conducteur du film est François Le Cadre, chercheur au Centre des Mondes Africains, qui étudie les saints éthiopiens, les pratiques religieuses des moines, et cherche des informations sur Saint Samuel qui a fondé au XIVè siècle le plus important monastère de cette « terre des moines ». Ce travail d’investigation, mené avec d’autres chercheurs, se base sur les témoignages des moines ainsi que sur les manuscrits et reliques conservés dans les lieux saints (dont des évangiles parmi les plus anciens au monde). Nous le suivrons de monastères en monastères jusqu’au Woldeba, point d’aboutissement de ses recherches. En partant de ce présent, seront évoqués plus de 15 siècles d’histoire du christianisme en Éthiopie. Pourquoi l’Éthiopie a pu devenir chrétienne dès 330 ? Qui étaient les premiers moines éthiopiens ? Comment le pays a-t-il été évangélisé ? De quelle façon les monastères se sont-ils développés ? Comment ces pratiques religieuses si singulières ont-elles pu perdurer jusqu’à aujourd’hui ?

Jean-Louis Saporito

Journaliste de formation, Jean-Louis Saporito a d’abord été Correspondant d’Antenne 2 aux Etats-Unis. Producteur de magazines et de documentaires, fondateur et dirigeant, entre autres, de l’agence de presse Point du jour, puis de l’association Contrechamps (qui apporte un soutien aux confrères des médias travaillant dans les pays du sud), il est a fait de l’Afrique son continent de prédilection au sujet duquel il réalise documentaires, livres et expos photos.

Imaginaires en exil : 5 cinéastes d’Afrique se racontent

Dimanche 10 novembre à 18 h 30. Petit Kursaal.

Réalisé par Daniela Ricci • Bénin/Burkina/Éthiopie/Ghana/Nigéria, 2013, 53 min.

Imaginaires en exil : 5 cinéastes d’Afrique se racontent

Portrait de cinq cinéastes africains majeurs en exil et de leurs parcours artistiques et personnels, de Paris à Washington, de Ouagadougou à Ouidah, en passant par Uppsala et Londres.

Être à la fois d’ici et de là-bas ? Newton Aduaka, John Akomfrah, Haïilé Gérima, Dani Kouyaté et Jean Odoutan : cinq cinéastes africains majeurs en exil racontent leurs parcours artistiques et personnels, de Paris à Washington, de Ouagadougou à Ouïdah, en passant par Uppsala et Londres. Le film les suit dans leur quotidien d’exilés, qui résonne avec des extraits de leurs films, expression de leurs identités complexes. À travers les regards de ces cinq cinéastes, constamment à la recherche d’un équilibre entre différentes cultures, des masques tombent et des mythes se fracassent !

Daniela Ricci

Après avoir travaillé pour les Nations Unies pendant des années, dans divers pays d’Afrique et d’Amérique Latine, Daniela Ricci est aujourd’hui doctorante en cinémas d’Afrique à l’Université Lyon 3 (France) et Howard (Washington). Elle enseigne le cinéma à l’Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3. Elle collabore avec le Festival du cinéma africain, d’Asie et d’Amérique Latine de Milan et, depuis 2006, organise le Festival Uno sguardo all’Africa de Savone (Italie). Imaginaires en exil. Cinq cinéastes d’Afrique se racontent est son premier documentaire.

Journalistes, vos papiers !

Samedi 9 novembre à 18 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Laurène Lepeytre • Algérie/Côte d’Ivoire/Haïti/France, 2013, 53 min.

Journalistes, vos papiers !

« L’exil est une espèce de longue insomnie », écrivait Victor Hugo. En France, il y a des journalistes étrangers qui ne dorment plus, d’autres qui rêvent éveillés, d’autres encore qui se sont faits français. Ce film raconte, à travers les portraits de deux hommes et d’une femme réfugiés en France, l’exil, la recherche de l’identité et de l’intégration en France, à travers un métier-passion mais risqué pour les ressortissants de certains pays : celui de journaliste. Depuis l’obtention du statut de réfugié en France, certains ont retrouvé du travail, d’autres non. Mais tous ont dû s’adapter, s’intégrer. L’un d’eux a repris le micro, mais ses deux confrères se sont reconvertis de force dans l’hôtellerie, la sécurité et le gardiennage, le « social »… Comment ces journalistes se sont-ils reconstruits ?

Demande de regroupement familial pour certains, longue toujours, vaine souvent… Réinvention d’une vie sentimentale en France, reconstruction d’une nouvelle cellule familiale, au bonheur véritable ou à l’effet placebo. L’exil, c’est aussi la recherche d’un nouvel équilibre dans un pays que l’on n’a pas choisi.

Et l’identité dans tout ça ? Menacés, torturés, rejetés de leurs pays, forcés à l’exil pour échapper au pire, certains journalistes ont pourtant trouvé en France une terre d’accueil, une source de paix intérieure, un nouveau départ. L’exil est un tissu de tiraillements humains que ce film propose d’aborder, humainement, sans le regard de sociologues ou de victimologues, mais simplement en recueillant les témoignages de ces trois personnes dont les destins se sont croisés un moment entre les murs de la Maison des Journalistes à Paris. C’est le point de départ de ces trois destins, le lieu qui les a rassemblés, rassurés, accompagnés. C’est l’unique association au monde qui héberge les journalistes demandeurs d’asile pendant six mois. Tous les trois ont donc passé cette période entre ces murs avant de prendre leur envol dans la société française : Soro Solo, Tcheita et Ahmed ont tous été sur la sellette, plongés dans l’angoissante période d’attente du statut de réfugié. De ces six mois de doute passés à la Maison des journalistes, tous gardent un souvenir indélébile. La fin de la fuite pour la survie, le commencement d’une nouvelle vie. Six mois, comme un no time’s land où tout peut arriver. Ce film relate également la période charnière commune à ces journalistes en exil, à travers des extraits du livre du journaliste et écrivain tchadien Ahmat Zeidane Bichara, lui aussi exilé.

Laurène Lepeytre

Du Cameroun au Burundi, de l’Ouganda à l’Égypte, à la Tanzanie, l’Inde ou la France, Laurène Lepeytre traite de sujet aussi divers et brûlants que la construction d’un barrage aux sources du Nil, le dialogue interreligieux entre Coptes et Musulmans, le portrait d’un village Masaï où l’excision est abolie, ou encore l’exclusion par leur Église de fidèles infectés par le Sida. Cette jeune réalisatrice globe-trotter considère le film documentaire comme un objet militant : sa jeune carrière en est un bel exemple.

L’Opéra du bout du monde

Mardi 12 novembre à 14 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Marie-Clémence et César Paes • Madagascar, 2012, 96 min.

L’Opéra du bout du monde

Un road movie historique dans les coulisses de l’opéra Maraïna pour découvrir l’histoire des premiers habitants des îles de l’océan Indien. À Fort-Dauphin, au Sud de l’île, là où les officiers de la Compagnie des Indes ont rencontré les Malgaches pour la première fois, Jean-Luc Trulès, le compositeur réunionnais, va diriger son orchestre devant une foule qui n’avait jamais vu d’opéra. Les récits s’entrecroisent pour raconter à plusieurs voix cette histoire méconnue. Un voyage musical qui navigue entre le XVIIè siècle et 2012, dans un triangle qui relie La Réunion, Madagascar et… Paris, pour mieux entendre l’océan Indien d’aujourd’hui.

Commentaire de la revue Madagascar Musiques : « … Ce film, par ses tours et détours, nous montre un « work in progress » passionnant d’un opéra monté sur le lieu même de son histoire. Il nous emporte dans une traversée fascinante de Madagascar aujourd’hui, au plus près de ses pistes et de ses croyances, et mêle les histoires et mémoires parallèles des malgaches et des français à propos de mêmes événements : le départ de Fort Dauphin des premiers habitants malgaches et français vers l’Île de La Réunion. Un film envoûtant pour les amoureux d’opéra, de Madagascar, d’histoire et de musique… »

Marie-Clémence et César Paes

Elle est Malgache, il est Brésilien. Ils font des longs métrages documentaires où la musique est à la fois trame narrative et prétexte pour écouter les cultures orales. Auteurs, entre autres, de Mahaleo, 30 ans de chansons des Mahaleo pour faire un portrait de Madagascar aujourd’hui (Étoile SCAM 2007), Saudade do Futuror (Grand Prix du public aux Rencontres de Cinéma du Forum des images), Angano, angano… Nouvelles de Madagascar (Grand Prix au Festival dei Popoli et le Prix des Bibliothèques au Cinéma du Réel 1989), Le Bouillon d’Awara ou Aux guerriers du silence (Colombe d’Or à Leipzig 1992).

Le Chant des tortues, une révolution marocaine

Mardi 12 novembre à 16 h 30. Petit Kursaal.

Réalisé par Jawad Rhalib • Maroc, 2013, 85 min.

Le Chant des tortues, une révolution marocaine

Maroc, 20 février 2011 : des jeunes qu’on disait dépolitisés, mous, sans idéaux, vont réussir a faire sortir dans la rue plusieurs centaines de milliers de Marocains, tous habités par une exigence de dignité, liberté, justice et le refus de la peur. Après 30 ans de vide, une génération de révolutionnaires est née. Du lièvre ou de la tortue lequel d’entre nous parierait sur la victoire de la tortue ?

Les événements du printemps arabe reviennent régulièrement à la Une des médias. La Tunisie, l’Égypte, où tout s’est précipité, bénéficient d’une large couverture médiatique. Mais le Maroc est quasiment absent. Il a pourtant entamé une réforme profonde, à son rythme, celui d’une tortue. Les débats et prises de parole sont omniprésents. La société marocaine bouge, suit l’actualité du monde arabe, s’interroge sur son devenir, son identité, ses valeurs. Après les décennies de règne d’Hassan II, où l’expression était contrôlée, la prise de parole a également eu lieu au Maroc. Le journaliste Jawad Rhalib a choisi de suivre ces prises de parole. Il a rencontré de nombreux interlocuteurs, des jeunes, des artistes, des militants religieux, des défenseurs de la laïcité… Il les a confrontés aux projets d’avenir dans un pays en mutation. Il a épinglé diverses époques, celle des révoltés, des islamistes, de la guerre culturelle… Il propose un film d’information et de réflexion. Il montre une société diversifiée, qui s’interroge, se met en question, qui se replie sur elle-même parfois. Une société en lente mutation, mais en mutation profonde. Non pas au rythme du lièvre, mais bien de la tortue.

Jawad Rhalib

Auteur, cinéaste et journaliste professionnel. Jawad Rhalib oriente son travail sur les droits de l’Homme et les questions liées à la Mondialisation, le Profit et le Réalisme social. D’origine belgo-marocaine et diplômé en communication de l’Université catholique de Louvain-La-Neuve, il a reçu des formations en réalisation en Europe et à la RTM (Radio Télévision Marocaine), ainsi qu’une formation en journalisme. Depuis 1997, Jawad Rhalib a réalisé plus d’une dizaine de films, entre autres sur l’Inde, l’Amérique Latine, le Vietnam, l’Afrique du Sud ou Madagascar. Son dernier, El Ejido, la loi du profit, traite des ouvriers marocains, immigrés sans-papier, sans le sous, sans domicile, qui s’épuisent à cultiver des tomates dans l’air vicié par les pesticides dans le Sud de l’Espagne. Sortis en salle dans plusieurs pays, ses films ont reçu plusieurs prix : Fespaco, Festival International du Film Panafricain de Cannes, Vision du réel de Nyon, Festival International de Monte Carlo, Festival International du Film de Montréal. Et une Nomination aux Oscars Européens : European Academy Award pour Les damnés de la mer.

Les Enfants du Seigneur

Lundi 11 novembre à 18 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Yasmina Farber et Anne Gintzburger • Centrafrique, 2012, 59 min.

Les Enfants du Seigneur

On compte plus de 300 000 enfants soldats qui combattent actuellement dans le monde : 100 000 en Afrique. Depuis une dizaine d’années, les enfants soldats sont devenus les bras armés indispensables et la marque de fabrique des groupes rebelles qui sévissent en Afrique, dans la région des Grands Lacs, entre la République Démocratique du Congo, l’Ouganda et la République centrafricaine. Ainsi, 80 % des troupes de la LRA (l’Armée de Résistance du Seigneur) seraient composées d’enfants soldats, les petites filles enlevées étant destinées à être des esclaves sexuelles. Ce film suit les pas de cette LRA, en Centrafrique. De Bangui à la Haye, à Washington et New York, ce film nous mène sur les sentiers empruntés par ces armées de gamins, où se jouent chaque jour des drames d’une violence inimaginable. Et sur les traces de leur chef sanguinaire, Joseph Kony. Les réalisatrices sont parties à la rencontre de ce « Seigneur de Guerre » poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l’Humanité par la Cour Pénale Internationale. Leur but ? Cerner le personnage et ses méthodes de gourou qui ont mis tant d’enfants au pas. Et tenter de répondre à ces questions : qui est vraiment ce chef de guerre qui, avec ses miliciens assoiffés de sang et de massacres, les « Tongos Tongos », sillonne l’Afrique centrale en toute impunité depuis plus de 20 ans ? Pourquoi Kony réussit-il toujours à échapper à la justice internationale ? Elles sont retournées aussi dans les villages martyrs, pour rencontrer les enfants survivants et recueillir leurs témoignages. Comment vivent ces victimes rescapées des crimes de Joseph Kony ? Ces adolescents survivants, évadés par miracle des bandes armées pour le compte desquelles ils étaient forcés d’opérer, tentent depuis de se reconstruire et de surmonter leurs traumatismes. Ils décrivent les crimes perpétrés, graves violations du Droit international humanitaire, et demandent à ce que les auteurs soient recherchés, arrêtés et sanctionnés.

Yasmina Farber

Yasmina Farber a débuté comme reporter à France 3 Côte d’Azur en 1992, puis à France 2 comme correspondante. Du reportage « tout terrain » : c’est là-bas qu’elle a pu découvrir son domaine de prédilection, l’humain en souffrance. De là elle couvre des procès d’assises, qui l’ont aguerrie (dont pendant 4 mois le procès de Marc Dutroux en Belgique). Ce sont alors les grands reportages pour France 2 : New York, 24 h après les attentats du 11 septembre, Bagdad après la chute de Saddam Hussein, Jérusalem en tant que correspondante. Puis le long format s’est imposé : elle intègre l’équipe de Complément d’Enquête en 2004. Et se tourne logiquement vers le documentaire (après une formation de réalisation à l’INA) et la réalisation en free lance de films qui lui tiennent à cœur. Son dernier documentaire, Les enfants du Seigneur, co-écrit avec Anne Gintzburger, correspond non seulement à son savoir-faire, mais aussi à sa vision du métier : raconter, témoigner, être parfois le porte-voix des oubliés des médias… comme les enfants soldats.

Pygmées de la route

Lundi 11 novembre à 16 h 30. Petit Kursaal.

Réalisé par Marie Devuyst et Alain Lemaître • Cameroun, 2012, 60 min.

Alors que la plupart des Pygmées du Cameroun vivent toujours en brousse, une poignée de familles sont venues s’installer au bord d’une route bitumée, dans un village où leur vie quotidienne balance entre maintien des traditions et adaptation à la société bantoue moderne. Le film nous mène à la rencontre des Pygmées de la route, une petite communauté à la croisée des chemins.

Pendant la guerre coloniale au Cameroun, les Pygmées de la forêt ont dû s’installer au bord de la route. C’était il y a quarante ans. De nombreuses familles sont depuis reparties en brousse, mais certains, dont Papa Nkoro et sa famille, sont restés au village de Ngoyang, un village où leur vie quotidienne balance entre maintien des traditions et adaptation à de nouveaux modes de vie. C’est dans l’intimité de ce quotidien et les conversations qu’apparaissent les transformations liées à ce mode vie : le travail, l’appauvrissement de la forêt, la médecine « des Sœurs » et la médecine traditionnelle, enfin leurs relations avec les Bantous, et leur difficile adaptation à une société dite plus « moderne ».

Marie Devuyst

Marie Devuyst est née en 1982 à Bruxelles. Après avoir étudié la communication, elle se dirige vers une formation en cinéma documentaire à Sint-Lukas, où elle réalise Tant que sifflera la mine danseront ses épis. Elle réalise ensuite des courts métrages pour le secteur associatif, sur le thème du vieillissement, de l’immigration, de l’adoption. En 2011, elle part plusieurs mois au Cameroun et co-réalise avec Alain Lemaitre le documentaire Pygmées de la route.

Alain Lemaitre

Alain Lemaitre est né en 1980 à La Louvière (Belgique). Après avoir suivi des études d’histoire et de philosophie à l’Université Libre de Bruxelles, il a enseigné pendant 6 ans en école secondaire, et est aujourd’hui formateur pour adultes. Pygmées de la route est son premier film en tant que réalisateur et preneur de son.

Thinghir-Jérusalem, les échos du Mellah

Mercredi 13 novembre à 18 h. Petit Kursaal. En présence du réalisateur Kamal Hachkar, dans le cadre de la journée thématique « Le départ des Juifs d’Égypte et du Maroc ».

Réalisé par Kamal Hachkar • Maroc, 2011, 86 min.

Thinghir-Jérusalem, les échos du Mellah

Récit d’un exil, ce film suit le destin de la communauté juive ayant quitté la ville Berbère de Tinghir, dans l’Atlas Marocain, dans les années 1950/1960. Kamal Hachkar, originaire de Tinghir, nous emmène à la croisée des cultures et fait résonner les chants, les voix et les histoires de cette double identité partagée entre juifs et musulmans : « J’ai grandi dans l’idée que tous les berbères étaient musulmans. Mais à Tinghir, ma ville natale dans l’Atlas Marocain, les récits de mes grands-parents m’ont fait découvrir que d’autres berbères étaient juifs. Dans de nombreux villages, juifs et musulmans vécurent ensemble. Pourtant, au début des années 60, malgré plus de 2000 ans d’histoire commune, tous ces juifs quittent l’Atlas jusqu’au dernier. Je pars alors à la rencontre de cette mémoire enfouie auprès de la génération qui a connu cette présence juive, mais très vite cette recherche me mène en Israël où je retrouve quelques-unes des familles originaires de Tinghir. Entre ici et là-bas, ces anciens me racontent d’une même voix leur vie passée et répondent à mes interrogations : Comment nos deux communautés ont-elles cohabité ? Comment et pourquoi cette séparation si soudaine et définitive ? Pourquoi un tel silence ? En rencontrant mes alter-égos juifs, des Israéliens de ma génération, eux aussi originaire de Tinghir, je m’aperçois que nous partageons le même désir de retrouver une mémoire commune. En exhumant cette part enfouie de nos identités, ma génération saura-t-elle reconnaître les liens brisés par la grande Histoire ? »

Critique presse

« … On sort de ce film bouleversé par ces aventures humaines, corps et âmes ballotés par l’Histoire… » — Youssef Aït Akdim, Jeune Afrique, 22/28 avril 2012.

Kamal Hachkar

Jeune franco-marocain de 33 ans, d’origine berbère et de culture musulmane, Kamal Hachkar est né à Tinghir. Il a quitté le Maroc à l’âge de six mois avec sa mère pour rejoindre son père qui avait immigré en France en 1968. Toute son enfance a été jalonnée par les déplacements de son père ouvrier aussi bien en France qu’à l’étranger. De tous ces déplacements, il a gardé une tendresse et une sensibilité particulières aux exilés, aux déracinés. Après avoir étudié l’Histoire à la Sorbonne, il est devenu enseignant. Intéressé par la culture juive au Maroc et le patrimoine judéo-marocain, il a voulu découvrir cette culture en Israël et au Maroc. Apprenant l’hébreu, il a organisé des soirées culturelles autour des poètes juifs et arabes à Paris (Amichaï, Bialik, Darwish). Il a aussi participé à des débats mettant en lien des élèves israéliens et palestiniens en les faisant réfléchir autour des notions d’identité et du rapport au clan, à la tribu. Thinghir-Jérusalem, les échos du Mellah est son premier film.

Un long sillon de la Dordogne au Bénin

Mercredi 13 novembre à 14 h. Petit Kursaal.

Réalisé par Frédéric Chignac • Bénin, 2012, 66 min.

Un long sillon de la Dordogne au Bénin

Le Bénin est classé parmi les pays les plus pauvres de la planète. Sa seule richesse est l’agriculture et, pourtant, le pays est régulièrement menacé par les crises alimentaires. Pour éviter ces pénuries et optimiser le potentiel de sa terre, le Bénin a tenté, à plusieurs reprises, de mécaniser ses méthodes de production. Toutes ont échoué. Mais depuis 1995, une petite équipe d’agriculteurs Dordognais est en passe de réussir là où les échecs se succèdent, via le système des CUMA, Coopérative d’Utilisation du Matériel Agricole.

Ce film est une véritable bouffée d’optimisme, même si l’histoire qu’il raconte est loin d’être un long fleuve tranquille… En 1995, les agriculteurs béninois ont demandé… à leurs confrères français des explications sur le fonctionnement des CUMA (Coopérative d’Utilisation du Matériel Agricole). L’histoire est tombée sur une bande d’agriculteurs aquitains qui n’avaient jamais mis les pieds en Afrique. Elle a été initiée par Thierry Guérin, un agriculteur-producteur de lait, de noix et de châtaignes, directeur de la La Fédération départementale des CUMA de Dordogne, qui ne connaissait pour ainsi dire rien du Bénin. Les CUMA ont été créées en France après la seconde guerre mondiale, pour contribuer au redressement de l’agriculture alors en piteux état. La CUMA béninoise s’en inspire. Elle regroupe une dizaine d’agriculteurs qui se choisissent eux-mêmes et qui achètent en commun un tracteur, une charrue et une remorque. Depuis, lentement mais sûrement, les coopératives se multiplient au Bénin. En quelques années, la productivité et le niveau de vie de ces agriculteurs qui travaillaient jusqu’alors leur champ manuellement, avec une houe, ou dans le meilleur des cas, avec une charrue attelée à des bœufs, a sensiblement augmenté. Au delà de l’amélioration du sort individuel des agriculteurs, le but de ces CUMA est de contribuer à l’autosuffisance alimentaire du Bénin. Mais par ailleurs, elles constituent une alternative à une nouvelle forme de colonisation qui se met en place en Afrique avec la multiplication d’investisseurs privés et d’États comme la Chine, les pays du Golfe… qui cherchent à acquérir les terres riches d’Afrique. À l’heure où cette partie du monde et ses riches terres agricoles suscitent la convoitise de nouveaux prédateurs, où les risques de nouvelles émeutes de la faim se font de plus en plus pressants, cette histoire de CUMA ressemble à une alternative, un moyen pour les paysans béninois de conserver les clefs de leur destin et surtout de remplir le rôle le plus noble pour eux : nourrir la population de leur propre pays.

Frédéric Chignac

Frédéric Chignac est scénariste et réalisateur, de films de fiction comme de documentaires. Depuis plus de 20 ans, il diffuse sur les grandes chaînes françaises des réalisations qui l’emmènent de l’Afrique du Sud en Égypte, du Sénégal aux pays de l’Est et de Chine aux USA (Minnesota), sans oublier la France. Quelques-uns de ses films : Au pays des droits de l’Homme (fiction), Samoa, après Dieu : le Rugby (documentaire), Le temps de la Kermesse est terminé (fiction, Prix du jury du Grand Prix du Meilleur Scénariste).

Boy Saloum, la révolte des Y’en a marre

Samedi 9 novembre à 14 h. Petit Kursaal. En présence de la rélisatrice Audrey Gallet (sous réserve).

Réalisé par Audrey Gallet • Sénégal, 2013, 73 min.

Boy Saloum, la révolte des Y’en a marre

En 2011, quelques jeunes Sénégalais créent le mouvement « Y’en a marre ». Ils ne savent pas qu’ils vont bientôt rejoindre la grande Histoire en prenant la tête de la contestation sociale contre le régime du président Wade. Ils sont le symbole d’une jeunesse africaine ancrée dans l’époque, ouverte sur le monde, avide de culture, attachée à la démocratie, bien loin des clichés occidentaux sur l’Afrique.

Ce film est l’histoire de quatre jeunes Sénégalais : Thiat et Kilifeu, qui font partie des rappeurs les plus populaires du pays, Denise, informaticienne, branchée sur les réseaux sociaux, et Fadel, journaliste d’investigation. Ils ont 30 ans, une énergie de feu et un charisme hors norme. Dans la banlieue de Dakar, en 2011, ces quatre amis créent un mouvement citoyen qui va embraser le Sénégal : « Y’en a marre ». En quelques semaines, ils entraînent derrière eux la jeunesse du pays, inventent la dissidence à l’africaine et lancent le premier mouvement des droits civiques à l’échelle du continent noir. Sous nos yeux, ils écrivent la grande Histoire en devenant les leaders de la contestation sociale contre le régime. Les « Y’en a marre » persuadent plus de 350 000 jeunes de s’inscrire sur les listes électorales, font circuler une pétition qui récoltera plus d’un million de signatures et font le tour des médias du monde entier. Ils deviennent les porte-paroles d’une jeunesse africaine étouffée par le chômage et les petits boulots sans avenir, soumise au diktat d’une économie mondialisée, privée de systèmes éducatifs et de santé dignes de ce nom ; une jeunesse qui rêve d’embarquer sur des rafiots de fortune dans l’espoir d’une vie meilleure. Le mouvement « Y’en a marre » va convaincre cette jeunesse sénégalaise que son avenir est au pays, mais que c’est à elle de le construire, en commençant par l’indispensable : mettre à bas le vieux président Wade accroché à son pouvoir. Il va révéler au monde entier que cette jeunesse est ancrée dans l’époque, ouverte sur le monde, avide de culture, attachée à la démocratie. Une jeunesse qui pourrait être un accélérateur de l’Histoire. Une jeunesse qui, en un an, a fait entrer toute l’Afrique dans le XXIè siècle.

La réalisatrice Audrey Gallet avait pressenti ce mouvement. Depuis fin 2009, elle a filmé Thiat, Kilifeu, Denise et Fadel avec une grande proximité et une belle intimité. Elle s’est ainsi retrouvée aux première loges du mouvement, rapportant des images exceptionnelles : la naissance et l’explosion d’une révolution dont l’Europe n’a sans doute pas encore pris la mesure. Un document exceptionnel, qui pose le premier jalon d’un changement radical de regard sur l’Afrique et les Africains.

Audrey Gallet

De formation littéraire puis passée par la vidéo-danse, les clips et les reportages musicaux, elle a été formée en classique, jazz et hip-hop. Dans les années 2000, elle devient danseuse contemporaine du Collectif Zone Libre. C’est sa rencontre avec Alma Arboleda (réalisatrice colombienne) qui l’emmènera vers l’audiovisuel. Depuis, elle promène sa vigilance et sa caméra du Sénégal à l’Europe de l’Est, de l’Éthiopie au Tchad ou à la Zambie. Elle a reçu en 2012 le Prix Albert Londres (avec Alice Odiot) pour son documentaire sur l’extraction du cuivre en Zambie, intitulé Zambie : à qui profite le cuivre ?.

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