Journalistes, vos papiers !
Samedi 9 novembre à 18 h. Petit Kursaal.
Réalisé par Laurène Lepeytre • Algérie/Côte d’Ivoire/Haïti/France, 2013, 53 min.
« L’exil est une espèce de longue insomnie », écrivait Victor Hugo. En France, il y a des journalistes étrangers qui ne dorment plus, d’autres qui rêvent éveillés, d’autres encore qui se sont faits français. Ce film raconte, à travers les portraits de deux hommes et d’une femme réfugiés en France, l’exil, la recherche de l’identité et de l’intégration en France, à travers un métier-passion mais risqué pour les ressortissants de certains pays : celui de journaliste. Depuis l’obtention du statut de réfugié en France, certains ont retrouvé du travail, d’autres non. Mais tous ont dû s’adapter, s’intégrer. L’un d’eux a repris le micro, mais ses deux confrères se sont reconvertis de force dans l’hôtellerie, la sécurité et le gardiennage, le « social »… Comment ces journalistes se sont-ils reconstruits ?
Demande de regroupement familial pour certains, longue toujours, vaine souvent… Réinvention d’une vie sentimentale en France, reconstruction d’une nouvelle cellule familiale, au bonheur véritable ou à l’effet placebo. L’exil, c’est aussi la recherche d’un nouvel équilibre dans un pays que l’on n’a pas choisi.
Et l’identité dans tout ça ? Menacés, torturés, rejetés de leurs pays, forcés à l’exil pour échapper au pire, certains journalistes ont pourtant trouvé en France une terre d’accueil, une source de paix intérieure, un nouveau départ. L’exil est un tissu de tiraillements humains que ce film propose d’aborder, humainement, sans le regard de sociologues ou de victimologues, mais simplement en recueillant les témoignages de ces trois personnes dont les destins se sont croisés un moment entre les murs de la Maison des Journalistes à Paris. C’est le point de départ de ces trois destins, le lieu qui les a rassemblés, rassurés, accompagnés. C’est l’unique association au monde qui héberge les journalistes demandeurs d’asile pendant six mois. Tous les trois ont donc passé cette période entre ces murs avant de prendre leur envol dans la société française : Soro Solo, Tcheita et Ahmed ont tous été sur la sellette, plongés dans l’angoissante période d’attente du statut de réfugié. De ces six mois de doute passés à la Maison des journalistes, tous gardent un souvenir indélébile. La fin de la fuite pour la survie, le commencement d’une nouvelle vie. Six mois, comme un no time’s land où tout peut arriver. Ce film relate également la période charnière commune à ces journalistes en exil, à travers des extraits du livre du journaliste et écrivain tchadien Ahmat Zeidane Bichara, lui aussi exilé.
Laurène Lepeytre
Du Cameroun au Burundi, de l’Ouganda à l’Égypte, à la Tanzanie, l’Inde ou la France, Laurène Lepeytre traite de sujet aussi divers et brûlants que la construction d’un barrage aux sources du Nil, le dialogue interreligieux entre Coptes et Musulmans, le portrait d’un village Masaï où l’excision est abolie, ou encore l’exclusion par leur Église de fidèles infectés par le Sida. Cette jeune réalisatrice globe-trotter considère le film documentaire comme un objet militant : sa jeune carrière en est un bel exemple.